noir et blanc

Je te dirai qui tu es

Le portrait, c'est un peu mon Everest photographique — fascination, envie, crainte et renoncement. Comme un alpiniste de salon, je n'ai jamais vraiment tenté l'aventure, je me contente d'en rêver en regardant les photos que les autres en ont rapporté. Je sais ce que je vois, ce que je voudrais coucher sur la pellicule, je vois des modèles, je laisse filer les moments.

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Cet après-midi, comme c'est parfois arrivé, les étoiles se sont alignées. Le bon moment, la bonne personne, prendre le temps et laisser faire. Rien de très préparé mais quelques images plus ou moins réussies. Le regard de l'autre, ce qu'il cache et ce que je vois, l'intimité que l'on crée dans un temps fugace, et l'abime qui regarde en moi, qui mélange les sensations, qui m'arrête au milieu du mouvement.
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Photographie internationale

C'est en mode road trip que mon copain Claude et moi avons pris la route pour Köln et sa très renommée Photokina, l'un des salon photographiques les plus importants au monde. En l'espèce, nous n'avons pas été déçus. Deux jours pour voir les choses en grand !

La lumière bien sûr, mais aussi l'espace, le bourdonnement multilingue, les vitrines étincelantes, les sourires inamovibles des exposants gonflés à bloc et les images — les images, évidemment. Quelques expositions magnifiques et un long lèche-vitrines pour regarder le matériel rutilant présenté à nos yeux fiévreux, des nouveaux Olympus au moyen format Fuji, des drones en tous genres aux caméras fish-eye et autres gadgets vidéos présentés par une foule de fabricants asiatiques plus ou moins totalement inconnus.

Et une tendance amusante : le vintage photographique a toujours le vent en poupe et vire au tirage papier instantané, comme les vrais Polaroïds, en général dans une qualité à peine plus catastrophique que les originaux. On a bien vu une demi-douzaine de solutions autour de ce concept… novateur ?

Mais j'écris, j'écris, et j'oublie un point essentiel : la visite de Cologne.

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Le tourisme de salon a ses limites, et le déclencheur nous démange. Nous avons marché, traversé des quartiers assez déprimants, mais surtout vu quelques coins magnifiques, dans la périphérie comme dans le centre. Le tour a été court, mais très instructif grâce à une guide d'exception qui nous a fait découvrir "sa" ville (la famille est un peu dispersée, en l'occurence ça a du bon !). Et une cathédrale sombre à l'architecture flamboyante pour un mélange sucré-salé.

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Ah, et un détail curieux quand même, à la Photokina. Pour un salon international, j'aurais choisi l'anglais comme langue médiane et médium. Les Allemands ont une conception plus "française" de la chose : tout en allemand. Panneaux, conférences, plaquettes de présentation, service. Demärden Sie sich.

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Grande ouverture

La Trinité, en quelque sorte ! La grande nouvelle du jour, c'est l'arrivée d'un troisième objectif dans ma besace photographile : le Voigtländer Nokton 58 mm f/1.4 qui vient compléter le 20 mm et le 40 mm. Il y a bien quelques autres pièces dans mes affaires, mais ce sont ces trois là que je vise depuis des mois et que je compte bien emmener partout avec moi.

Je n'ai pas attendu pour aller le tester dans mon quartier de lignes préféré, et j'en suis revenu avec des pièces inattendues — pas très élaborées, mais en tout cas différentes de mes habitudes. Beaucoup de détails, de petits motifs, de lignes droites plutôt que fuyantes. Le regard change quand la focale varie.

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Pour sauver la face, ou revenir sur mon territoire habituel, j'ai quand même un ou deux clichés qui rappellent d'autres prises de vues plus abstraites. Notamment cette vue de l'auditorium, un angle dont je ne me lasse pas et que j'ai repris plusieurs fois avec des rendus — et des succès — différents :

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Quoiqu'il en soit, on sent toujours autant la "patte" de la marque Voigtländer sur mon nouvel arrivant, avec sa construction solide et son toucher si souple dans la mise au point. Profondeur de champ minimale à pleine ouverture, bien sûr, et déjà du piqué.

Pour le moment je suis encore un peu timide, mais un jour — un jour ! — je partirai faire du portait tout simple avec ce caillou tout doux. Ou l'inverse.
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Point de rencontre

Toujours ensorcelé par la vie vue dans les grandes largeurs, je sors, je sors encore, je regarde dans mon viseur et je vois fuir les lignes à tire d'aile. La moisson du jour me donnerait presque le vertige tant j'ai levé le nez pour regarder au fond d'abimes fuyant vers une singularité invisible.

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De temps en temps pourtant c'est le feu d'artifice et enfin on touche au but, comme dans cet enchevêtrement de fils tel qu'on n'en voit plus très souvent en ville, où les lignes sont plutôt enterrées ou collées aux murs.

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Un bon moment, une belle sortie, un peu de photo, point de rencontre.
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Distorsion

Dans l'univers de rêveries et de reflets qui me hante depuis quelques mois, je suis tombé un peu par hasard sur cette vision étrange et fugace : une voiture qui se fond dans le décor et adopte, pour ne pas nous heurter, le reflet de son environnement.

Une idée à l'équilibre un peu tendu, perdue entre les lignes arrondies du grand angle et un camouflage mimétique façon Ghost In The Shell. Sur le moment ça m'a frappé, j'ai pris la photo sans plus y penser. J'ai conservé ici le rendu direct de l'appareil (sauf retrait de quelques poussières un peu gênantes). Avec cette voiture banale, les arbres, la maison, je trouve quelque chose de spontané dans cette vue, un cadre qui s'oppose à un rendu d'apparence étudiée.

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Je crois qu'en fin de compte c'est une note à moi-même, un pense-bête pour essayer de retrouver cette idée dans d'autres situations — voir si le mélange entre reflets aux limites incertaines, déformations des lignes et contraste fort pourrait me mener quelque part. Une future série ?
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Plus grand que la vie

Sous la pluie, le bonheur. Celui de sortir avec mon boitier et… un nouvel objectif. Enfin ! Depuis presque un an que je le cherchais, j'ai fini par mettre la main sur un Voigtländer 20mm f/3.5 tout beau, tout neuf ! J'ai profité du weekend pour faire un tour en ville, et bien sûr je suis passé par mon quartier de test préféré.

J'ai bien un autre grand angulaire magnifique (le Nikon 24mm f/1.4, la huitième merveille du monde), mais comme il est un poil encombrant et que je sors de plus en plus légèrement équipé, j'avais perdu l'habitude de voir le monde en long et en large.

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J'ai donc redécouvert la complexité du cadrage avec un grand-angle. Bon sang, il en rentre dans le viseur ! Difficile de faire un choix, il faut sacrément bouger pour cadrer correctement : voilà qui promet de longs mois de travail avant d'être un peu mieux apprivoisé.

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Bref, un objectif formidable, compact et très bien construit, doux et précis dans la mise au point. Alors oui, les pixelomanes lui reprocheront des douceurs dans les coins et des franges un peu trop punk. Mais la vérité est ailleurs — n'écoutons pas les aigris et ne boudons pas notre plaisir !
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La porte du Diable

En battant la campagne, en empruntant quelque petite route dans la forêt, on la trouve facilement, si l'on sait où chercher. Cette ruine curieuse, inattendue et dont l'agencement défie le sens commun. Une porte à meneau en bordure d'un bois, flanquée de deux murs et deux contreforts qui font encore leur office. Son calcaire gris-beige renvoie la lumière forte de l'été malgré les arbres et le lierre qui l'assaillent.

On cherche en vain un ensemble plus grand auquel elle aurait été intégrée. Mais rien. Au pied d'une colline un peu raide, ce n'est guère étonnant. Mais qu'est-ce que c'est ? Saint Google répond à mes prières et me nomme la belle incongrue : la porte du Diable. Ou plus prosaïquement la porte Bonnet.

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On trouve tout, et surtout n'importe quoi, dans les textes écrits à propos du lieu. Diables et dames blanches, illuminés et sectes, vandales et étudiants avinés, vidéos loufoques et photos sous toutes les coutures. Je reviendrai peut être un jour de brume faire quelques clichés d'ambiance plus douceâtre. En attendant je me suis assis près de cette porte et j'ai écouté le silence du paradis et le chant des oiseaux dans la forêt…
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Photographe, toujours tu chériras l'hiver

Petite sortie presque hivernale ce matin. À l'heure où blanchit la campagne, je… Non, une bonne heure après cette heure-là, j'ai rejoint mes camarades de crapahute dans la nature. Notre objectif (ha, ha, jeu de mot !) était de capturer un peu de ce qu'on aime dans l'hiver : les matins brumeux, le soleil timide qui vient après, le givre et la rosée sur les herbes humides, les couleurs passées de la forêt et l'air aussi glacé que clair.

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Mais à part un peu de brume, pas grand chose de tout cela aujourd'hui. Je n'ai pas ramené de "belles" photos. Ce n'est pas grave. Restent les échos de notre amitié, le plaisir d'avoir marché ensemble, les joues rosies de froid, et nos rires plus ou moins fins résonnant joyeusement dans la campagne…
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Le saloon de la photo

Entre ici, ô cowboy photographique ! Toi qui marche les jambes arquées à cause de ton matériel si imposant. Toi qui ne peut faire un pas sans emmener un boitier de deux kilos, flanqué de son objectif à la lentille énorme, posé sur un trépied sorti d'un film de science fiction. Toi qui viens au Salon de la Photo parce que tu vis photo, tu respires photo et tu plies sous le poids du matériel haut de gamme.

Aujourd'hui, pour ponctuer deux mois de travail infernal non-stop, c'est journée plaisir au milieu des autres geeks de la photo, à la grand' messe du genre, à Paris bien sûr. Petit cliché dans le train avec mon copain Claude, compagnon d'aventures photo, ami de toujours depuis dix ans (oui, oui), l'oeil constamment rivé au 5D et l'imagination sans cesse en alerte…

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Et nous avons donc pris bien du plaisir à regarder, tester, tripoter et conjecturer sur tout ce que le monde de la photographie offre de plus raffiné, de plus tape-à-l'oeil, de plus cher, de plus technologique, de plus poétique ou de plus surfait. Nous avons tâté du Zeiss, du Nikon, du Canon, même du Fuji, des objectifs qui valent six mois de salaire (les bons mois…), des imprimantes qui pèsent le poids d'une voiture, des photos qui vomissent la couleur et d'autres qui sussurent l'amour du temps qui passe.

Le tout au milieu des rêveurs et des techno-poètes comme nous, au milieu des prétentieux qui ne sortent pas sans un sac à dos énorme et deux boitiers à la ceinture, au milieu des dingues du déclencheur qui mitraillent les hôtesses et les mires de test, au milieu des rédacteurs de magazines, des conférenciers, des développeurs d'applications miracles, des farfelus qui font une analyse freudienne de chaque photo, des agences de voyage, des gens qui mâchent la bouche ouverte, de ceux qui sont juste contents d'être là et sourient aux autres, des artistes d'un jour et des vendeurs de billets gratuits à la sauvette.

Mais avec ça, on n'a même pas pu voir un Leica. Non. Car Leica n'expose pas. Leica se contente d'être là et de toiser le reste du monde. Leica cache ses boitiers dans les tiroirs mélaminés d'un meuble fermé à clef. Pff.
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Sous les nuages, la plage

Je ne suis pas très sûr de l'intérêt de ce titre, mais je voulais juste partager cette photo du dimanche. Et puis j'adore photographier les immeubles et les nuages, c'était vraiment le bon moment pour ça. Une journée de pluie acariâtre mêlée d'éclaircies ombrageuses. Et entre les gouttes, quelques photos de ces bâtiments arrogants et superbes qui voudraient monter à l'assaut des cieux courroucés.

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Les entre-lieux

Ça y est, enfin, je l'ai ! Quoi ? Mais l'objectif dont je rêve depuis des mois. Le passage du zoom aux focales fixes a été un bonheur, je saute maintenant le pas de l'autofocus à l'objectif manuel. Alors, place au Voigtländer Ultron 40 mm f/2. Manuel, discret, magnifiquement construit.

Pour fêter ça, bien sûr, je suis sorti faire quelques photos. Et c'est curieux : au lieu de me jeter sur mes sujets de prédilection, j'ai bloqué sur quelque chose que je n'avais pas vraiment regardé avant. Des espaces urbains déserts, jamais vraiment inutiles, mais pas vraiment utilisés. Des espèces d'entre-lieux, coincés parmi des lieux plus utiles, plus visibles.

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Les connaissez-vous, ces entre-lieux ? Ils nous aspirent et nous rejettent en même temps, ils sont vides mais pleins de cicatrices du passé et du futur, ils sont silencieux et bruissent de mille feuilles mortes, à la fois ternes et vulgairement colorés, éternellement présents et jamais vraiment vus. Je me suis promis de faire une série là-dessus un jour. Evidemment, il faudra être sacrément inspiré !

Heureusement, j'ai aussi retrouvé, non loin de là, les lignes rassurantes et les brillances étranges de mes architectures favorites…

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